Dans cette belle campagne présidentielle, ce bel argument revient souvent. Il n’est pas neuf. En l’occurrence, il cible quelques candidats dans cette campagne dont les propositions sont en rupture avec la vision dominante de l’économie. Lancé comme argument d’autorité à la figure de gens qui ne se reconnaissent pas dans le néolibéralisme économique, il tente d’invoquer le « bon sens » pour justifier qu’une seule orientation idéologique est possible, et que toutes les autres « manquent de crédibilité ».

Dans un objectif de bonne compréhension mutuelle, voici quelques raisons pour lesquelles cette phrase frappée au coin du bon sens est complètement à côté de la plaque.

1) On a déjà beaucoup produit (et même sans doute trop)

On peut considérer que « chaque jour est à lui seul une vie » et donc qu’il faut produire chaque jour ce dont on a besoin pour vivre avant de le redistribuer. Oui, on peut penser ça. Mais dans le monde réel, on a déjà produit plein de choses sur lesquelles on peut s’appuyer, et beaucoup de choses dont on n’a pas vraiment besoin. Et justement, l’injonction de produire toujours plus sans se demander si cela est bénéfique pour nous pose un gros problème aujourd’hui. C’est cela que certains appellent « la dette écologique ».

Donc avant de produire, réfléchissez !

2) L’argent ne se mange pas

Avant de redistribuer de l’argent, il faut produire de l’argent. Avant de distribuer des patates, il faut produire des patates. Mais on peut très bien distribuer de l’argent avant de produire des patates.

C’est d’ailleurs le principe du revenu universel : on pré-distribue à chacun un même montant, sans regarder ce qu’il va produire ensuite. On investit dans chaque personne une somme d’argent, et chaque personne produit ensuite des patates. Elle peut ensuite vendre des patates pour gagner encore plus d’argent (le fameux argent qu’on a déjà produit en France depuis le temps qu’on en fabrique).

3) Qui investit dans l’économie réelle ?

Ce mantra suppose que ce que l’argent qu’on ne redistribue pas sert à investir dans la production. Honnêtement, c’est de la mauvaise foi.

Combien de cet argent sera investi dans des achats immobiliers, des assurances vie, des placements financiers divers et combien sera réellement investi dans des entreprises, des associations, des organisations de l’économie réelle ?

4) Produire de la connaissance a un coût

Last but not least, on oublie de dire que dans une économie de plus en plus tournée vers la connaissance, on doit s’intéresser à où se produit cette connaissance.

Où se produit-elle ? Souvent dans des endroits à l’écart de la logique marchande. A l’école et dans les centres de recherche, dans les associations où les bénévoles développent des compétences qu’ils réutiliseront probablement dans leur vie « professionnelle ». Pour produire, il faut donc investir !