Voici un poème de Julien Soubeste sur la course pour le pouvoir. Ce jeu pour certains jouissif dans lequel l’élu remporte le droit de dominer les autres. En cette époque jupiterienne, dans laquelle rien, sur la route de notre monarque ne doit obstruer ses désirs, un peu de poésie et d’ironie reste encore possible !

Les Monarques

A l’orée du pouvoir, au croisement des routes
Qui mènent l’homme au siège, en silence et sans doute,
Tapis dans la pénombre indécise et fuyante,
De grands chasseurs aux yeux avides patientent,
A l’affût de la chaire et du faudesteuil vides,
Dont l’étoffe irisée, les matières splendides,
Telles l’ivoire et l’or, et les pierres précieuses
Font de leur reflet une toile radieuse.

Et quand dans une joute où l’éclat triomphant,
N’a d’égal que l’écrasement des contendants,
Le pas de ces nemrods, par caresses devinent,
Le tapis des honneurs sous la liesse divine,
De leur moelle jaillit, le terrible frisson,
Des jouissances, des firmaments, du Panthéon !

Puis de la tête aux pieds, de la peau jusqu’aux os,
Raisonnent dans leur corps tel l’infini écho,
L’appel et l’onde dévorante devenus,
L’insatiable désir du pouvoir absolu
Et suprême, dont l’accès éternel soulève,
D’infernaux affres mais les plus suaves rêves.

Sur ce lé qui rougeoie sous la voûte lustrée,
Ces grands seigneurs du fard, princes infatués,
Déambulent si fiers, avec tant de superbe ;
Ne voyez-vous pas l’allure du jeune imberbe ?
Qu’ils s’imaginent tous dans la fresque mythique,
Gravés dans l’épopée aux légendes uniques ;
Et parmi les héros, ô lignée rugissante !
Contemplent leur image à jamais éclatante.

Portrait beau et géant, orné des fleurs de lys
Du sacrement, qu’ont portées les rois, de Clovis
A Emmanuel, en passant par les Henry
François et Nicolas. Malgré les Tuileries
Le règne des Monarques reste ainsi vivant,
Couronnes et sceaux font la mémoire du temps.

Julien Soubeste